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Pour une IA plus frugale (Les Échos)

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L’explosion annoncée de l’IA générative sera très énergivore. Au-delà du recours aux énergies renouvelables, la réflexion est engagée pour développer des algorithmes d’apprentissage automatique et des modèles plus frugaux.
Par Stéphan Clémençon, professeur de mathématiques appliquées à Télécom Paris.

Selon le rapport 2024 sur la durabilité environnementale récemment publié par Microsoft, le géant de l’informatique a augmenté ses émissions de CO2 de près de 30 % depuis 2020. Cette augmentation semble largement due aux émissions indirectes liées à la construction de nouveaux centres de données pour répondre à la demande en matière de services cloud. En effet, elle coïncide avec la période où Microsoft a commencé à renforcer son soutien à l’intelligence artificielle (IA) afin de répondre à l’arrivée massive d’OpenAI et de son application d’IA générative ChatGP.

Lorsque l’IA telle que nous la connaissons aujourd’hui (le « machine learning ») a commencé à prendre son essor dans les années 1990, la technologie était par nature frugale. Nous ne disposions que de capacités relativement limitées de calcul et de mémoire, et de peu de données à « montrer » en exemple aux machines pour leur permettre, via des algorithmes d’apprentissage statistique, de réaliser automatiquement des tâches. Ces dernières années, cependant, il est devenu possible d’entraîner des modèles d’IA d’une sophistication inédite avec des données massives – les données du web le plus souvent – pour assurer des services de plus en plus variés.

L’IA d’aujourd’hui est tout sauf frugale : les données sont répliquées, découpées de façon redondante pour essayer de « voir » et exploiter toute l’information disponible grâce à des structures de calcul en réseau de grande complexité. En fin de compte, ces calculs requièrent une communication intensive, coûteuse en énergie, de masses de données. […]